À la sortie de la COP27 sur les changements climatiques à Charm el-Cheikh, en Égypte et de la COP15 à Montréal sur la biodiversité, nous sommes présentement au cœur des discussions de l’impact des changements environnementaux et climatiques. Bien que ces conférences aient pour but de favoriser la mise en place de stratégies durables au sein des pays participants, qu’en est-il des populations qui en sont plus durement affectées ? À l’échelle mondiale, les conséquences se font généralement ressentir auprès des populations les plus vulnérables, affectées par des sécheresses ou des inondations de plus grandes envergures. À l’échelle nationale, ici au Canada, que peut-on faire ressortir de ces inégalités face aux impacts des changements climatiques ? Peut-on faire preuve de plus de justice environnementale ?
Qu’est-ce que l’injustice environnementale ?
D’abord, l’injustice environnementale représente les inégalités qui sont engendrées par l’aggravation de la crise climatique et par la dégradation environnementale qui occurrent de manières disproportionnées envers les populations les plus vulnérables. En d’autres mots, il peut s’agir des inégalités que vivent les populations racisées (communautés afro-américaine, autochtone, etc.), les quartiers défavorisés et les grandes villes industrialisées, en lien avec des industries polluantes et des activités environnementalement dangereuses. Ce concept est né aux États-Unis, dans les années 1960, alors que les communautés afro-américaines étaient affectées par des problèmes de pollution démesurés. Directement relié aux mouvements de droits civiques qui avaient lieu à cette époque, le terme de justice environnementale est apparu autour de 1980 afin d’y intégrer les inégalités sociales et environnementales.
Concrètement, ces groupes sociaux peuvent se retrouver expatriés, avoir accès à moins d’espaces naturels, être à proximité d’usines polluantes ou de sites d’enfouissement. Conséquemment, la santé et la qualité de vie de ces communautés s’en trouvent donc directement affectées. Ces mêmes groupes tendent à être marginalisés et moins consultés dans les prises de décisions relativement aux projets d’aménagement et d’urbanisme.
De telle sorte, la justice environnementale se veut donc être un mouvement qui désire une protection de l’environnement par le biais de mise en place de politiques, de lois et de règlements sans être à l’encontre de droits humains.
Visionnez ce court vidéo pour comprendre la justice environnementale au Québec :
Justice environnementale : Pourquoi on n’en parle pas au Québec ?
Comment ces injustices se manifestent dans notre société ?
Au Québec, ce sont les communautés autochtones qui en sont affectées avec les déchets qui sont brûlés à ciel ouvert dans le Nord. Pour le Québec méridional, on dénote notamment les populations de Rouyn-Noranda et de Limoilou à Québec avec les taux d’arsenic dans l’air. On relève aussi dans l’est de Montréal, en raison des raffineries, des rejets environnementaux causant des dommages pour la santé. Notamment, on peut citer la population du quartier Notre-Dame à Rouyn-Noranda, qui s’est indignée face à leur exposition à d’importantes émanations de la fonderie Horne en Abitibi. Comme on peut l’observer, les groupes sociaux marginalisés impactés sont rarement consultés lors de la mise en place de tels projets.
Au niveau des îlots de chaleur, qui sont considérés comme une autre forme d’injustice climatique, ce sont les quartiers les plus défavorisés où on observe le plus gros manque de végétation, menant à des augmentations de chaleur jusqu’à 12°C plus élevées que la température ressentie.1
Vous pouvez consulter notre article à ce sujet.
Les communautés minoritaires n’ont bien souvent pas les moyens financiers, les ressources et la représentation politique pour s’opposer aux sites de déchets dangereux, aux émissions de polluants par les industries ainsi qu’au manque de végétation dans les quartiers. C’est pour ces raisons que des groupes doivent se mobiliser et que des lois doivent être mises en place pour soutenir les compagnies, les municipalités tout comme les citoyens dans des processus décisionnels complexes impliquant des enjeux associés à la pollution, à la santé publique et à l’acceptabilité sociale.
Quelles sont les prochaines pistes ?
À l’issue de cette discussion, il est possible de ressortir qu’à l’échelle nationale, il y a de nombreux impacts sociaux et environnementaux répartis de manière injuste sur certains territoires et dans certaines communautés. Ainsi, le mouvement de justice climatique est fort important car il vise à assurer une équité en termes d’accès à un environnement sain. On retient évidemment l’importance de consulter l’ensemble des populations et non uniquement les principaux acteurs économiques œuvrant sur un territoire. De cette façon, on tend vers une justice dans la communication des enjeux et dans la prise de décisions.
D’ailleurs, il va de soi que de ne pas discriminer les communautés ethniques, culturelles ou encore défavorisées, lorsqu’il est question de réaliser des projets dans les milieux de vie, doit être une pratique courante. Malheureusement, il est toujours possible de rencontrer des injustices et des inégalités, puisque pour le moment il n’y a pas de législation à cet effet. Dans l’intention de remédier à ce manque, il y a un projet de loi en développement depuis 2020 au niveau fédéral qui vise un amendement à la Loi canadienne sur la protection de l’environnement, le projet de loi S-5 en matière de pollution et de substances toxiques.2 Le projet de loi C-226 a aussi été déposé l’an dernier concernant l’élaboration d’une stratégie nationale ayant pour but d’évaluer et prévenir le racisme environnemental pour lutter contre les injustices environnementales. Le but visé est de créer la Loi sur la stratégie nationale relative au racisme environnemental et à la justice environnementale de manière à réduire les externalités négatives qui touchent directement ces populations et de leur permettre de s’exprimer et de prendre part aux décisions.
Enfin, l’acceptabilité sociale doit devenir un processus indispensable à introduire dans les projets de moyens et grandes envergures. Par exemple, la consultation citoyenne est déjà partie prenante de nombreux projets municipaux, il est donc nécessaire de poursuivre dans cette lignée et de faire preuve de transparence en présentant les enjeux environnementaux que des projets pourraient engendrer. De plus, les élus sont davantage conscientisés à la lutte aux changements climatiques et aux inégalités sociales présents sur le territoire. Les élus peuvent mettre en œuvre des actions concrètes afin de faire changer les choses dans leurs administrations respectives. Le lien direct entre ces représentants et les citoyens en est un de confiance qui est maintenu par leur accessibilité et leur transparence. Ces représentants sont les premiers à faire face à l’acceptabilité sociale et aux commentaires de la population.
Cela dit, la solution peut être fort simple. Parfois, la commodité d’ajouter un acteur externe neutre peut faire toute la différence dans le processus de consultation et/ou de négociation entre les différents intervenants. D’ailleurs saviez-vous que ConsulTerre peut vous accompagner dans un processus de consultation citoyenne?
Consultez notre page à cet effet (municipalités et villes).
Pour pousser votre réflexion plus loin, on vous propose :
Lecture : Fondation David Suzuki : Les injustices environnementales au Québec